Dialogue entre Alex et Jacky : Une certaine vision des prix de revient…
L’investissement…
Alex est un spécialiste des chiffres dans l’entreprise où il travaille, il passe souvent en fin de semaine chez son ami Jacky, patron de bar dans son quartier. Depuis peu de temps, Jacky a installé une machine qui distribue des cacahuètes sur le comptoir. Il s’est dit que cela pouvait lui ramener un peu d’argent. Il vend la dose de cacahuète à 30 centimes d’euro, et son établissement connait une forte affluence au moment de l’apéro.
Bien sûr, la machine a coûté 300 €, mais il pense qu’elle sera amortie en quelques jours. Jacky n’a pas fait d’étude en comptabilité, mais il est doté d’un solide bon sens : « 1000 doses de cacahuètes vendues et la machine est amortie. » De plus, les cacahuètes cela donne soif, et les clients consommeront un peu plus… Sans compter l’aspect convivial que cela amène au moment de l’apéro… en 3 mois, c’est une affaire qui va rapporter !
La remise en question : la méthode de calcul !
Alex, dubitatif devant ce nouvel investissement, interroge son ami Jacky :
– « As-tu bien réfléchi à ce qu’allait te coûter ce distributeur ? »
– « Ben oui ! … Enfin, il m’a coûté 300 €, et la dose de cacahuète me coûte environ 10 centimes, et je la vends 30, je ne suis pas très inquiet! »
– « Attends, attends, ce n’est pas si simple ! Cette machine te prend de la place sur le comptoir. Tu immobilises ainsi de la surface de « vente » pour tes clients ! »
– « Ah bon ? »
– « Mais oui Jacky ! Réfléchi deux secondes : Le coût d’une dose de cacahuète n’est pas simplement de 10 centimes ! Il faut considérer les frais fixes de ton établissement et les coûts d’amortissement de ton distributeur pour savoir si tu ne vends pas à perte ! »
– « … »
« Je t’explique : chaque vente que tu effectues doit payer sa quote-part de frais de structure si tu veux que ton affaire soit rentable. Il faut ramener tes frais de structure au prorata de ta surface de vente qui est essentiellement ton comptoir, et considérer dans un deuxième temps la place occupée par ton distributeur sur le comptoir. »
Le résultat implacable …
Après un calcul assez compliqué, et en tenant compte des frais généraux, Alex détermine que le coût complet d’une dose de cacahuètes se monte à environ 34 centimes d’euro, et donc que Jacky n’a pas du tout intérêt à vendre ces cacahuètes sur son comptoir à 30 centimes la dose !
– « Tu vois Jacky, la gestion c’est quelque chose de compliqué ! Heureusement que je te connais et que j’ai pu voir que tu allais faire une grosse bêtise ! En un mot tu perdais 4 centimes par dose de cacahuètes vendue… A ce tarif-là, en quelques mois tu te mettais en réelle difficulté ! ». Et Alex de poursuivre : « Soit tu arrêtes tout de suite de vendre ces cacahuètes, soit tu passes le prix à 40 centimes au minimum »
– « Oui, mais mon concurrent le plus proche fait aussi des cacahuètes à 30 centimes! Je ne peux pas les vendre plus chères ! »
– « Eh bien ton concurrent il va exploser en vol ! Et ça te fera plus de clients ! Maintenant tu fais ce que tu veux … C’est ton affaire après tout ! »
Alex finit son verre, le paya et souhaita « bon courage » à son ami Jacky qui resta pensif un long moment…
Epilogue…
Jacky décida finalement de bien vendre ses cacahuètes au prix qu’il avait fixé. Quelques mois plus tard, il fit des travaux dans son bar, et augmenta la taille de son comptoir. Les clients arrivèrent toujours plus nombreux … Jusqu’à ce qu’un minuscule virus vint compromettre ses projets. Mais ça, c’est une autre histoire !
Morale de l’histoire
Bien qu’il soit toujours difficile de tout prévoir, les règles de gestion ne sont pas très compliquées à comprendre et à intégrer dans ses projets de développement. Faisons attention aux approches trop compliquées ou trop théoriques :
« Mieux vaut être approximativement juste que précisément faux »
Vincent Loubière